mardi 8 février 2011

Quoi de commun entre la fortune du clan Ben Ali et le système Moubarak ?

Des spécialistes affirment que la fortune de la famille du président égyptien se situe entre 40 et 70 milliards de dollars. Une estimation difficile à vérifier et qui donne un faux air de Tunisie au régime d’Hosni Moubarak.


La fortune de la famille du président égyptien Hosni Moubarak pourrait atteindre les 70 milliards de dollars [51 milliards d’euros, NDLR]. L'estimation en question (qui évoque une fourchette entre 40 et 70 milliards de dollars), avancée dans les colonnes du quotidien britannique The Guardian de dimanche, provient d’évaluations faites par des experts égyptiens.

La plupart de cette fortune serait placée dans des banques étrangères ou investie dans l’immobilier à Londres, New-York ou encore à Los Angeles.

Ce tableau d’une famille roulant sur les dollars suggère un parallèle avec le clan formé par le président déchu tunisien Zine El-Abidine Ben Ali et la famille Trabelsi. Un raccourci réfuté par plusieurs spécialistes de l’Égypte.

"A part son salaire public de plusieurs milliers d’euros, on ne sait rien de la richesse exacte d’Hosni Moubarak", estime Jean-Noël Ferrié, directeur de recherche au CNRS et auteur de "L’Egypte, entre démocratie et islamisme. Le système Moubarak à l’heure de la succession". Il estime que l’évaluation de la fortune de la famille du président est exagérée "d’un ou deux zéros au moins". Tewfik Aclimendos, chercheur spécialisé sur l’Égypte au Collège de France partage le même avis. Pour lui, la richesse du président égyptien est inchiffrable.

Un clan pratiquant le clientélisme à l’extrême

Cela dit, contrairement à la Tunisie, la société égyptienne toute entière, "du petit gradé de la police au proche du pouvoir", participe de ce système de corruption, selon Jean-Noël Ferrié. Là où certains dénonçait en Tunisie un "racket organisé" par le pouvoir, l’Égypte souffrirait davantage, selon le chercheur du CNRS, d’un système de "clientélisme poussé à l’extrême".

En effet, Hosni Moubarak - et même l’ancien président Anouar el-Sadate dans les années 70 - ont octroyé des avantages à toute une partie de la population – hommes d’affaires, militaires - afin d’acheter leur soutien, assurent les deux spécialistes. La plupart du temps, ces largesses prennent la forme d’opportunités immobilières, comme des hôtels ou des parcelles de terrains bradés à bas prix. En Tunisie, une petite clique, liée au président et à la famille de sa femme, les Trabelsi, récupérait la plus grosse part du pactole.

Au sein du clan présidentiel, les proches d’Hosni Moubarak ont profité à plein du système. "On sait, notamment, que Gamal Moubarak [le fils cadet, ndlr] doit une partie de sa fortune à son mariage avec la fille d’un richissime entrepreneur égyptien spécialisé dans le bâtiment", précise Jean-Noël Ferrié.
Mais le placement de fonds à l’étranger est loin d’être une spécificité du président et de ses proches. "N’importe quel entrepreneur égyptien, même d’une société de moyenne envergure, crée des montages financiers hors d’Égypte", assure Jean-Noël Ferrié.

Contrairement donc à la Tunisie, où une petite clique avait accaparé une grande partie de la richesse du pays, en Égypte, un bien plus grand nombre de personnes dépendent toujours financièrement du régime d’Hosni Moubarak.


Sébastian SEIBT





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